Ultra Trail : "La diagonale des fous" sacre Baptiste Chassagne

Personne ne l’avait vraiment vu venir. Moins d’un mois après les Mondiaux, beaucoup pensaient que Baptiste Chassagne serait trop entamé pour briller sur la Diagonale des Fous, l’une des courses les plus exigeantes du monde. Mais samedi, il a prouvé le contraire. Et il l’a fait avec une maîtrise impressionnante.

Le 4ème et dernier Major de l'année a été fidèle à sa réputation : Exigeante et sauvage, cette ile surnommée "L'ile intense" ne jure que par la "diag" durant 1 semaine, et voit passer les plus courageux coureurs de la planète.

Une victoire pour sa première participation

Pas freiné par la chaleur étouffante en journée, ni par les sentiers très techniques alternant cirques et pitons, le natif de Lyon âgé de 31 ans a écrasé la course pour sa première participation, avec un temps de 23 heures 31 minutes et 54 secondes pour venir à bout des 175kms et 10 500 mètres de dénivelés positif.

"Dès le premier kilomètre j'ai compris que cette course allait devenir une course de cœur, je n'ai jamais vécu ça, c'était exceptionnel", a réagi le vainqueur après son arrivée. "J'avais des bonnes jambes et je me suis retrouvé tout seul sans forcément le vouloir. J'avais une sorte de grâce, mais j'ai "ramassé", c'est tellement dur."

Régulier et accrocheur, Yannick Noël s’est classé deuxième à 55’ de Chassagne, tandis qu’Aurélien Dunand-Pallaz, victorieux en 2023, s’est classé troisième à 1h41’, juste devant l’éternel Ludovic Pommeret, qui courait là son troisième ultra de l’été (après avoir remporté la Hardrock aux Etats-Unis et pris la sixième place de l’UTMB).

BAptiste Chassagne itinéraire d'un champion en quéte de sens

Pourtant, rien ne le prédestinait à se lancer dans l’ultratrail. Originaire de Lyon, ce grand fan des Verts de Saint Etienne (qui n'hésite pas à rappeler sa passion pour le football et pour le stade Geoffroy Guichard à chaque fois que nécessaire) grandit loin des sentiers avant de rejoindre Paris pour étudier à Sciences Po, où il fréquente surtout « les allées citadines et les terrains de football ». Un stage chez Dynastar le ramène en Haute-Savoie, au cœur des montagnes. Dans le même temps, ses parents achètent un appartement à Combloux. C’est le déclic. « À partir de ce moment-là, j’ai commencé à dévaler tous types de terrains et j’ai adoré ça », confie-t-il à un média local.

De nature compétitrice, Chassagne s’aligne rapidement sur des courses locales, avec succès. Jusqu’à son premier 100K en 2020, il enchaîne les victoires sur formats 20 à 50 kilomètres – dix en quatre ans. Ce cérébral vit avec le syndrome de l'imposteur, et ce frein mental est avant tout un moteur pour lui. « Mon rêve ultime est de devenir un champion légitime par ses résultats et inspirant par son approche et ses actions. »

A 31 ans maintenant et quelques milliers de kilomètres plus tard, l’athlète s’est endurci. Il reconnaît volontiers avoir trouvé une forme d’apaisement — lui, le coureur émotif, capable d’être porté par la ferveur du public autant que déstabilisé par ses propres doutes. Cette sérénité, il la construit pas à pas, au fil de ses résultats : champion de France de trail long en mars 2023, deuxième de l’UTMB en août 2024, champion du monde par équipe avec la France à Canfranc en septembre 2025.

Le licencié au club de Véranne, dans le massif du Pilat, cher à son cœur. a comme compagnon d'entrainement au Jogging Club de Véranne le récent champion du monde de trail court Fréderic Tranchant. une densité de champion exceptionnel pour ce petit massif.

Le survol de l'hirondel

Chez les femmes, la Française Blandine L’Hirondel a également survolé la course, achevée en 27 h 26 min, loin devant les autres concurrentes (plus de 4h sur sa dauphine). Pour sa première participation, la coureuse de 34 ans, licenciée à Alençon, dans l’Orne, et au solide palmarès avec notamment une troisième place à l’UTMB en 2023 ou plusieurs titres mondiaux et européens, a réalisé le huitième temps au classement général scratch – non genré. C’est la cinquième femme à réussir à finir dans le top 10 de la course.

« A la base je voulais surtout terminer cette “Diag”, la victoire c’est la cerise sur le gâteau. C’est une grande fierté », a réagi Blandine L’Hirondel, qui a fait ses études à La Réunion, où elle a rencontré son compagnon. « J’ai découvert le trail ici, ma vie a changé ici. » Sa principale rivale, la Canadienne Marianne Hogan, un temps à la lutte avec elle avant d’être lâchée, a abandonné, vendredi soir, en raison « d’un problème à la jambe », a-t-elle annoncé sur son compte Instagram.