Jasper Philipsen remporte la première étape

Le Tour de France a à peine commencé que le ton est déjà donné. Au terme d’une première étape mouvementée, marquée par les bordures, les chutes, les abandons et des écarts inattendus entre favoris, c’est Jasper Philipsen (Alpecin-Deceuninck) qui s’est imposé au sprint ce samedi à Lille. Le Belge, déjà maître de l’exercice, décroche ainsi son dixième succès sur la Grande Boucle… mais surtout son tout premier Maillot Jaune, à 27 ans.

Un podium trompeur au goût de souffrance collective

À première vue, l’étape semblait taillée pour les sprinteurs, et le podium — Philipsen devant Biniam Girmay (Intermarché-Wanty) et Soren Waerenskjold (Uno-X Mobility) — confirme cette hypothèse. Pourtant, cette boucle de 184 kilomètres autour de Lille a mis le peloton sous pression comme rarement une première journée l’a fait au XXIe siècle.

Vent de sud-ouest soufflant à plus de 20 km/h, nervosité extrême, tentatives d’échappées, multiples chutes, et surtout, des bordures fatales : la route des Flandres françaises a piégé quelques grands noms, à commencer par Remco Evenepoel, Primoz Roglic et Joao Almeida, tous trois relégués à près de 40 secondes du groupe principal.

Le coup de force des Visma-Lease a Bike et le sang-froid de Pogacar

À 20 km de l’arrivée, l’équipe Visma-Lease a Bike de Jonas Vingegaard a parfaitement exploité les conditions venteuses pour créer la cassure décisive. Vingegaard lui-même a contribué à creuser l’écart, démontrant une forme et une ambition affichées d’entrée. Dans le groupe de tête : Tadej Pogacar, isolé mais solide, a tenu bon malgré les difficultés. Seul Tim Wellens l’a accompagné dans cette phase clé, tandis que son coéquipier Joao Almeida, censé être un lieutenant de choix, se retrouvait piégé.

Cette désorganisation chez UAE-XRG interroge : si Pogacar a résisté, son équipe semble vulnérable dans des conditions aussi imprévisibles. Ce premier test grandeur nature pourrait déjà redistribuer les rôles internes et compromettre certaines stratégies à long terme.

Chutes et abandon : Ganna et Bissegger à terre

La journée a été ponctuée par plusieurs incidents. Dès le début, une échappée de cinq coureurs — parmi lesquels Benjamin Thomas (Cofidis) et Mattéo Vercher (TotalEnergies) — a donné le ton. Derrière, le peloton était déjà sous tension. Les chutes violentes de Filippo Ganna (Ineos Grenadiers) et Stefan Bissegger (Decathlon–AG2R) ont contraint les deux rouleurs à l’abandon, preuve que même sur terrain plat, les risques sont omniprésents.

À 115 km de l’arrivée, l'équipe UAE-XRG a tenté un premier coup de semonce. S’il n’a pas été décisif, il a néanmoins écarté quelques outsiders, dont Lenny Martinez et Florian Lipowitz, tous deux relégués un temps avant de revenir grâce à une accalmie.

Une entame historique pour les Français

Côté tricolore, malgré l’absence de victoire, cette première étape est marquée d’une pierre blanche : Anthony Turgis (4e), Clément Russo (6e) et Paul Penhoët (7e) permettent à la France de placer trois coureurs dans le Top 10 d’une première étape du Tour pour la première fois depuis le début du XXIe siècle. Une performance encourageante, reflet d’un nouveau dynamisme dans les sprints.

Bilan : une première étape sans répit

Avec déjà deux abandons majeurs, des écarts importants entre favoris, des tactiques de course agressives, et un vent qui a dicté sa loi, cette première étape aura fait bien plus que désigner le premier Maillot Jaune. Jasper Philipsen confirme qu’il est le roi des sprints, mais le vrai vainqueur du jour est peut-être la stratégie et la lucidité dans le chaos.

Et ce n’est que le début.